Courses: Petit-Combin (3663 m)

Mis à jour le 19 février 2007

Petit-Combin par la face NW

Date: du mercredi 27 décembre 2006 au samedi 30 décembre 2006

Cordée: David et Frédéric

Conditions: hivernales, faible enneigement

Objectifs

L'objectif de départ était de traverser tous les Combins en une étape. Nous nous sommes quand même résolus à emporter le matériel de bivouac. Les conditions d'enneigement sont médiocres mais suffisantes pour ralentir la marche. De plus, en plein hiver par -15°C ou -20°C, aucune erreur de parcours n'est permise. La possibilité de faire un bivouac est notre meilleure garantie, même si le sac ainsi alourdi ralentira d'avantage notre marche.

Voici, et dans l'ordre selon le parcours projeté, la liste exhaustive des sept Combins: Petit Combin, Combin de Corbassière, Combin de Boveire, Combin du Meitin, Combin de Valsorey, Combin de Grafeneire et Combin de la Tsessette.

Le détail du parcours projeté est le suivant:

  • De Bourg-St-Pierre, rejoindre le col de Lâne et redescendre au pied du Glacier du Petit Combin
  • Remonter le Glacier du Petit Combin - branche W - et rejoindre le sommet du Petit Combin par sa face NW
  • Descendre le Glacier des Follâts en direction du Combin de Corbassière, le gravir par sa face W
  • Descendre l'arête S du Combin de Corbassière, traverser la branche N du Glacier de Corbassière en direction du Combin de Boveire, le gravir par sa face NE
  • Du Combin de Boveire, rejoindre le Plateau des Maisons Blanches jusqu'au Combin du Meitin, le gravir par sa face N
  • Redescendre sur le plateau des Maisons Blanches pour rejoindre le pied de la face NW du Combin de Valsorey, le gravir par cette face
  • Du Combin de Valsorey, le Combin de Grafeneire se rejoint facilement
  • Du Combin de Grafeneire, par l'Aiguille du Croissant, rejoindre le Combin de la Tsessette
  • Descendre le Combin de la tsessette par le Sud, vers le Glacier du Croissant, puis le Glacier du Mont Durand, puis le Col du Sonadon, puis le Plateau du Couloir, puis la Cabane de Valsorey et enfin Bourg-St-Pierre

En fin de compte, nous n'aurons fait, en 4 jours et 3 nuits, que le Petit Combin par sa face NW.

Premier jour et première tentative

Nous partons de Bourg-St-Pierre (1664 m) en début d'après-midi. Le chemin longe d'abord horizontalement la face W du Bonhomme du Tsapi jusqu'à Boveire d'en Bas, puis devient plus raide jusqu'à Boveire d'en Haut et Pointe de Toules. Du point 2643 m, le chemin conduit sous le Luis Neires, face S de la Pointe de Boveire. La dernière montée jusqu'au Col de Lâne est très raide. Du Col de Lâne (3033 m), nous redescendons direction NE jusqu'au point 2802 m, puis obliquons plein E jusque dans la combe qui marque le pied de la branche W du Glacier du Petit Combin. Nous bivouaquons à 2820 m environ, dans un plateau à mi-chemin entre les points 2802 m et 2932 m.

Le Lendemain, nous remontons la branche W du Glacier du Petit Combin. La marche est rude, même avec les raquettes. Un premier passage raide en glace nous fait mettre les crampons. Nous les garderons ensuite pour le reste de la journée. Nous tentons de franchir la barre de séracs en son centre. Un passage nous semble accessible, nous le suivons. Nous débouchons sur une vire en glace raide de 15 mètres de haut environ et qui devrait nous ouvrir la sortie sur le plateau supérieur. Mais les 5 derniers mètres se présentent comme un mur vertical que nous ne parvenons pas à franchir. La glace est cassante comme du verre, franchir ce passage en escalade sur glace raide relève plus du miracle que de l'acrobatie. Nous rebroussons chemin, contournons le passage un peu raide pris à la montée par la rive droite, et cherchons un emplacement pour un deuxième bivouac, pas trop bas si possible, vers 2960 m, rive droite du glacier. A noter que, pour faire bouillir deux litres d'eau à 3000 m par -15°C, il faut une petite bonbonne de gaz entière tenue contre le corps durant la journée, la poser sur un objet plat (raquettes à neige) et non à même la neige, et être bien protégé du vent.

Des séracs à la face N

Pas de variante cette fois. D'en-bas, l'itinéraire passe clairement en rive droite du glacier. Nous partons avec les crampons, la trace est "déjà faite". Nous débouchons à 3100 m sur un joli plateau dominé par de majestueux séracs au Sud. Nous le traversons direction W pour rejoindre le centre de glacier. L'irrégularité de la neige nous pousse à échanger nos crampons contre les raquettes. Après un dernier plateau et quelques crevasses à éviter, le glacier devient de plus en plus raide. Nous gardons encore les raquettes: avec les cales, celles-ci tiennent bon jusque dans des pentes de 45°. Nous arrivons à la rimaye, à 3460 m environ, où nous remettons les crampons et reprenons quelques forces. La dernière partie de la face est raide d'environ 55° et haute de 200 m. Des passages plus enneigés nous donnent l'impression d'avoir de bonne marches sous l'avant du pied, mais il n'y a guère que les pointes avant des crampons qui crochent (on espère!) sur une glace extrêmement dure et extrêmement cassante. Quant aux piolets, le premier coup donné nous éclate la glace à la figure, et après 3 ou 4 coup donnés parfois trop vigoureusement, par stress et poussées d'adrénaline, c'est un piolet ancré impossible à ressortir qui nous résiste. Bref, après deux heures de bataille, nous sortons de la face sur le plateau sommital (3663 m) où d'innombrable touristes se sont fait déposés mille fois en hélicoptère.

Il est tard, nous creusons deux tombes dans la neige où nous décidons bivouaquer avant la descente. Un coup d'oeil sur nos pieds avant de nous coucher nous indique qu'il y a des débuts de gelure. Naturellement, nous appliquons les précautions habituelles en pareil cas: chaussettes sèches, boissons chaudes, semelles des souliers contre le corps durant la nuit. Nous aurons aussi l'occasion de tester les réchauds à gaz à 3600 m d'altitude par -20°C et un petit vent intermittent. Nous ne réussirons jamais à faire bouillir un litre d'eau avec une petite bonbonne de gaz entière. Elle sera tiède juste ce qu'il faut pour un thé. Nous notons aussi qu'un trou dans la neige ne protège pas suffisamment la flamme du vent. Il faut la protection.

Du sommet par l'arête

Ce matin-là, nous nous sommes levés par un beau soleil que nous n'avions pas les deux matins précédents, côté Nord. Nous empaquetons le bivouac pour la troisième fois. Nous prenons l'arête NW pour la descente. Les conditions ne sont pas extraordinaires. Une arête rocheuse partiellement couverte de neige laisse parfois des surprises, une jambe qui s'enfonce dans un trou qu'on croyait bien comblé de neige, une cheville qui se tord sur un caillou instable juste invisible car recouvert de neige, etc. Il n'y a cependant aucune difficulté notoire. Un seul rappel nous a semblé nécessaire au vu des conditions, juste après le point 3506 m, après quoi nous avons décidé de laisser tomber l'encordement. C'est un peu après le point 3419 m que nous nous sommes engagés dans le couloir menant à la Combe de Lâne, dans le Lui Revers. Couper l'itinéraire à cette endroit plutôt que de continuer l'arête jusqu'au col de Lâne peut nous faire gagner beaucoup de temps. C'est en effet grâce aux conditions d'enneigement de cette combe que nous avons pu "luger" presque sans effort de 3400 m à 2800 m. Puis, à nouveau en raquettes, nous marchons jusqu'à Boveire d'en Bas. Attention à la bifurcation qui mène au Creux du Mâ. Pour retourner à Bourg-St-Pierre, il faut remonter de quelques mètres par le chemin de gauche! De là, Bourg-St-Pierre est à 1h30 de marche.

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